Dans une tribune intitulée « Le pire n’est jamais sûr : Éviter absolument le défaut ou transformer la crise en opportunité », l’ancien ministre de l’Économie Doudou Ka alerte sur la gravité de la situation financière du Sénégal. Il parle d’une crise « sans précédent », marquée par des tensions de trésorerie, la chute des eurobonds, l’absence d’accord avec le FMI et un risque de défaut désormais « réel ». Selon lui, un défaut serait un échec à la fois financier et moral, qui toucherait durement les ménages et fragiliserait la souveraineté du pays.
Pour éviter ce scénario, Doudou Ka appelle à dépasser les querelles politiques et à privilégier l’action : « Le Sénégal traverse une crise sans précédent : tensions de trésorerie, effondrement des eurobonds, incertitudes institutionnelles, absence d’accord de financement avec le FMI… Le risque de défaut n’est plus théorique, il est réel ! »
Pour l’ancien ministre, un défaut de paiement serait un «échec moral autant que financier», dont les conséquences frapperont durement la vie quotidienne des Sénégalais, des ménages aux goorgoorlus (débrouillards). L’enjeu fondamental est la souveraineté économique du pays. Il insiste : «Éviter le défaut, c’est refuser les postures : chercher des solutions plutôt que des coupables, agir plutôt que communiquer. »
Face à cette menace, Doudou Ka propose de méditer la leçon de la Malaisie en 1998, frappée par la crise asiatique. Le Premier ministre d’alors, Mahathir Mohamad, avait choisi une voie souveraine et pragmatique pour éviter l’effondrement : contrôle temporaire des capitaux ; restructuration des banques et de la dette; refus de l’austérité brutale imposée de l’extérieur.
Cette approche a permis de restaurer la confiance sans renoncer à la souveraineté. Pour Doudou Ka, le Sénégal doit s’inspirer de cette lucidité collective, qui « fait naître la force d’un peuple ». Afin de transformer la crise en opportunité, l’ancien ministre identifie trois piliers sur lesquels doit reposer un plan de relance crédible.
La condition première pour regagner la confiance est la « transparence totale sur la dette, les passifs, les méthodes de calcul et les engagements de l’État ».
Il appelle à la création d’un «front républicain pour la stabilité économique, au-dessus des clivages politiques», fondé sur la continuité de l’État. «Aucune réforme durable ne peut naître de la division», prévient-il.
Ce plan doit inclure la stabilisation de la liquidité, le reprofilage de la dette externe, la réduction du train de vie de l’État avec l’objectif clair de retrouver un solde primaire positif, et la réforme des entreprises publiques stratégiques.
Doudou Ka conclut que le danger véritable n’est pas tant économique que moral : « la division, la vengeance, la paralysie économique, le chaos social».
Il rappelle que la grandeur d’une nation se mesure dans la tempête et lance un appel final aux dirigeants : « Le patriotisme ne se proclame pas, il se prouve en disant la vérité, en protégeant le peuple, en privilégiant l’intérêt général, en refusant l’effondrement. »
Selon lui, le Sénégal doit choisir entre « la réaction politicienne, qui mène au défaut », et la « transformation stratégique, qui construit l’avenir », en faisant de ses partenaires, y compris le FMI, des alliés d’une stratégie audacieuse et rigoureuse.


